Gaspard de VENEL
(1612 - 1692)
Magdeleine de GAILLARD
(1620-1687)

- "Le nom (de
Venel) a été substitué depuis
plus de deux siècles à celui des Rastoin que portait la
rue dans laquelle (Gaspard de Venel) demeurait. Le nom de Rastoin
était celui d’une famille qui y logeait plus
anciennement ; et avant que celle-ci ne s’y établit,
c'est-à-dire depuis les XII° et XIII° siècles
jusqu’à la fin du XV°, cette rue était
appelée la Juiverie à cause qu’elle était
peuplée de juifs, lesquels se répandirent peu à
peu dans les rues voisines. »
Gaspard
de Venel et Madeleine de Gaillard, son
épouse, sont issus de la haute noblesse provençale.
Famille de VENEL
Armes :
coupé d’azur et de gueules par une fasce
d’or, l’azur chargé de trois pals d’or, et de
gueules d’un lion aussi d’or.
La famille de Venel appartient à la noblesse immémoriale.
Titres de noblesse justifiés depuis l’an 1281. Les plus
anciens de Venel sont écuyers du Comte de Provence -
Raimond de Venel fut présent à la convention faite en
1251 entre Charles d’Anjou comte de Provence et Banal des
Baux - Ils n’ont jamais cessé de porter
l’épée en dehors de 2 générations de
magistrats au XVII° siècle.
Les parlementaires aixois sont pour la plupart issus de la
noblesse et les familles se marient entre elles.
Le père de Gaspard, Jean de Venel épousa Jeanne de
Garron, fille de Jean de Garron, Conseiller au Parlement d’Aix,
Trésorier Général de France.
Famille
de GAILLARD de Longjumeau
Armes : d’or, semé de trèfles de sinople,
à deux perroquets de même, becqués, membrés
de gueules et affrontés ; à deux T de gueules en
chef.
Les origines de la famille sont discutées : Allemagne, Paris,
Blois?
Michel Gaillard épousa en 1512 Souveraine
d’Angoulême, sœur naturelle de François Ier.
Les ascendants de Madeleine de Gaillard se sont alliés aux
familles de Sains, de Lafayette, de Coigneux, de Charron et de Villages.
Le père de Madeleine, Pierre de Gaillard, était
conseiller au Parlement d’Aix.
Aux XVII° et XVIII°siècles, la famille occupa un
hôtel rue Verrerie où naquirent Madeleine et ses
frères et soeurs.
Les vies de Gaspard
de Venel et de sa femme
se sont partagées entre Aix et la Cour, à Paris et
à Versailles. Nés, élevés et mariés
dans le quartier St Sauveur, le plus élitiste aixois, fief des
familles issues de la noblesse d’épée, ils se sont
d’abord distingués par leur fidélité au roi
au cours des troubles de la Fronde et du Semestre à Aix.
- 1633 : mariage à Aix de Gaspard de Venel et Madeleine de
Gaillard, Gaspard qui était avocat, succède à
son père au Parlement d’Aix.
- Après l’arrivée de Mazarin en France en 1639 et
la nomination de son frère Michel de Mazarin comme
archevêque d’Aix, M. et Mme de Venel vont faire partie du
« cercle de Mazarin » et être très
proches du pouvoir royal.
- 1647 : Mme de Venel devient gouvernante des nièces de
Mazarin : Anne Marie Martinozzi, Laure et Olympe Mancini. Elle
séjourne avec elles 6 mois à Lyon pour leur apprendre la
langue et les bonnes manières.
- 1648 : elle obtient d’Anne d’Autriche le
privilège exclusif de débiter en Provence la glace
provenant des flancs de la Ste Baume, commerce qui lui rapportait
20.000 livres de rente.
- 1648 : M. de Venel cède sa place au Parlement à
son beau-frère, César Gaillard de Longjumeau.
-
1649 : pendant les troubles de la « guerre du
Semestre », guerre civile aixoise, M. de Venel se distingue
par son habilité politique et Mme de Venel par sa bravoure.
- 1652 : Gaspard de Venel est récompensé par Anne
d’Autriche : il devient « Conseiller du Roi en
ses conseils d’Etat et Privé » et
« Maître de Requêtes ordinaire de la
Reine ».
- 1653 : arrivent à Aix
- comme Gouverneur, le duc de Mercoeur. Il est accompagné de sa
femme, Laure Mancini (elle mourra en 1657 dans les bras de Mme de
Venel).
- de Rome les autres nièces de Mazarin : Marie, Hortense et
Marianne Mancini.
- 1659-1660 : intense activité et voyages de Mme de Venel
pour entraver les amours de Louis XIV et de Marie Mancini afin de
permettre le mariage avec l’infante d’Espagne. Elle passe
un an exilée à Brouage près de La Rochelle
avec Marie, Hortense et Marianne Mancini.
- La mort de Mazarin en 1661 et celle d’Anne d’Autriche en
1667 n’arrêtent pas l’ascension des de Venel. Ils
suivront la Cour à Versailles en 1671.
- Mme de Venel devient sous gouvernante des enfants de France et dame
d’honneur de la Reine.
- M. de Venel fréquente les salons littéraires et
écrit une tragédie
« Jephté » qui sera publiée en 1676
- 1687 : Mme de Venel décède à Versailles
- 1692 : M. de Venel décède à son tour et
rejoint sa femme dans le même tombeau à Aix en Provence.
Ils n’ont pas de descendants.
ART
BAROQUE et PRECIOSITE à l’HOTEL DE VENEL
Gaspard de Venel conserva
l’hôtel familial, irrégulier, moyenâgeux,
massé autour d’un étroit puits de lumière
occupé par un escalier à lourds balustres de pierre.
Mais, vers 1650, il fit réaliser, pour sa chambre, une
merveille de plafond peint maniériste et baroque dans
l’esprit d’une enluminure démultipliée.
Chaque voûtain, peint à l’huile, comporte une
trouée où évoluent dans un paysage de carte de
Tendre des angelots portant des banderoles sur lesquelles on peut
lire quelques vers d’un poème galant inspiré
par l’ouvrage du Collège des Précieux
« La Guirlande de Julie » : (Madeleine de
Gaillard était alors à Paris en charge des nièces
de Mazarin)
Allez, amours,
à tire d’aile,
Représentez-lui mes langueurs,
Assurez-la que je me meurs,
Mais ne revenez pas sans elle.
Le neveu de Gaspard, Henri d’Antoine de Venel, qui hérita
de l’hôtel, fit réaliser, 50 ans plus tard, toujours
dans le style baroque, une vertigineuse scénographie :
« le plafond des Titans »
Sauf les plafonds des deux chambres, tous les aménagements
intérieurs du XVII° siècle ont été
détruits ou modifiés, notamment par la
Congrégation des sœurs de St Vincent de Paul qui
occupaient les lieux à partir du XIX° siècle
jusqu’à l’installation des bureaux annexes de la
mairie qui s’y trouvent encore aujourd’hui.
PORTRAITS
Le peintre aixois, Laurent Fauchier,
excella dans le genre du portrait. Ceux qu’il réalisa de
Gaspard de Venel et de l’évêque d’Apt de
Gaillard furent présentés à la cour par Mme de
Venel et reçurent les éloges les plus flatteurs. Faute
d’avoir pu retrouver ce tableau, lisons le portrait de Gaspard de
Venel par un de ses contemporains:
« Quoiqu’il
n’eut que seize
à dix sept ans d’exercice, sa compagnie (le Parlement) lui
continua tous les honneurs de la charge, en considération des
grands et laborieux services, dont il s’était rendu
recommandable auprès d’elle. Le public, censeur
très rigide, dit, sur cela, que les services qui avaient
donné lieu à cette distinction devaient encore estre
qualifiés de périlleux et d’extraordinaires. Le
personnage n’en savait aussi faire que de cette nature.
C’était là son génie, son caractère,
qu’il faisait remarquer pour peu qu’on
l’observât.
Cette singularité se trouvait en toutes ses actions et en toutes
ses pratiques, en son vêtement, en sa maison, en ses meubles, en
son domestique, en sa manière de vivre et de manger, en ses
plaisirs, en ses habitudes, jusques en sa religion ; On dit que la
nature avait favorisé en lui ce caractère d’un
singulier humoriste, en lui donnant un teint assez bazané, fort
approchant de celui des peuples de Barbarie, parmi lesquels il se
trouve beaucoup plus de gens de cette qualité que dans les
autres nations.Il se plaisait de ce que le peuple, duquel il
s’approchait assez souvent, le prit pour magicien".
GASPARD DE VENEL :
FACETIES ET MASCARADES
Gaspard de Venel appartenait au
cercle des Précieux. Il fréquentait les hôtels
parisiens qui recevaient avec faste les puissants du moment. Dans ces
lieux où l’on s’amusait, toutes les farces avaient
droit de cité. Voiture était le maître des jeux
à l’hôtel de Rambouillet. Cette mode gagna le
Parlement d’Aix. Gaspard de Venel restera dans les
mémoires comme un plaisantin au goût parfois douteux mais
dont la ville entière parlait à
l’époque.Roux Alphéran relate quelques exemples de
ses plaisanteries dont furent victimes certains de ses invités.
- il avait équipé une chambre de son hôtel pour
faire monter et descendre le lit ; il surprenait ainsi ses
hôtes qui ne retrouvaient plus leur lit lorsqu’ils se
relevaient la nuit et devaient dormir sur une chaise. Comme ils
retrouvaient le lit à sa place à leur réveil, ils
n’osaient pas se plaindre de leur infortune.
- il fait traiter comme un seigneur un pauvre paysan, ramassé la
veille ivre mort, l’amène à renier sa femme qui se
venge en le rouant de coups.
De passage à Aix en Juin
1811, Fouché fait donner une représentation des
« Diableries et mascarades du Roi René »
dans lesquelles sont reprises des facéties de Gaspard de Venel.
PARTICIPATION AUX JEUX DE
LA FETE DIEU à AIX
Les jeux de la Fête Dieu sont
célébrés du lundi après la Pentecôte
au samedi après la Fête Dieu. Les parlementaires y
prennent une part importante car ils doivent y participer
financièrement, en tant que riches nobles de la ville, et
personnellement. Le jour de la procession, le Parlement en robe rouge
reçoit dans la Grande Chambre, le « roi de la
Bazoche » et tous les officiers de la
cérémonie. Précédé du premier
huissier portant la masse de justice fleurdelisée d’or, il
va avec le cortège à la Messe.
Les jeux recommencent leur tour après la
Procession : plus ils amusent le public, plus ils gagnent. M. de
Venel profite de ces occasions pour jouer un de ses tours
favoris : Il endosse des habits pareils à ceux des diables
et s’étant mêlé avec eux pendant la messe de
l’aurore, il leur fait une peur effroyable en les persuadant que
l’un d’eux est le vrai diable.
Extrait d’une lettre du 12.6.1671 de Mme de
Sévigné à Mme de Grignan sur les
cérémonies de la Fête Dieu : « Vous
mandez des choses admirables de vos cérémonies de la
Fête Dieu : elles sont tellement profanes que je ne
comprends pas comment votre saint archevêque (le Cardinal
Grimaldy) les veut souffrir, il est vrai qu’il est italien et que
cette mode vient de son pays. »
C’est vers l’an 1462 que le roi René voulut
conserver la représentation d’un tournois dans la
procession de la FêteDieu.
Dans l’Histoire de France, Magdeleine
de Gaillard est
plus connue sous le nom de Mme de VENEL
Elle fut une gouvernante très
stricte des nièces de Mazarin. Par son dévouement, elle
sut s’attirer les faveurs de Mazarin, d’Anne
d’Autriche, de Louis XIV et de la reine:
« Je ne vous saurais assez dire les obligations que je vous
ai du soin que vous prenez de mes nièces. Je vous prie
d’être assurée que je ne manquerai pas de le
reconnaître »
Extrait de la lettre du 8.9.1659 de Mazarin alors à St Jean de
Luz à Mme de Venel « Les nièces de
Mazarin » Etude de moeurs par Amédée
Renée - 1856 –
Mais elle pouvait aussi faire preuve d’une grande
énergie : « (au
cours de la guerre du
Semestre à Aix)… paraît une femme ; un
pistolet d’une main et une épée dans l’autre,
elle s’avance vers le plus épais du rassemblement en
criant hardiment : « Vive le Roi, hors d’ici
les sabreurs ». A son aspect, le peuple reste un instant
immobile ; mais bientôt se rangeant autour d’elle, il
répète les mêmes cris… Cette femme qui
était intervenue fort à propos pour la fortune de la
royauté, était la sœur de
l’évêque d’Apt, Gaillard de Longjumeau, la
femme d’un zélé parlementaire, le conseiller Venel.
Le dévouement qu’elle avait montré pour tous les
malheureux pendant la peste, en prodiguant se fortune et ses soins, lui
avait acquis un grand pouvoir dans la ville. »
La Misère au Temps de la Fronde et de St Vincent de Paul
par A. Feillet
Mme DE VENEL et les NIECES DE MAZARIN
Les premières arrivées en France furent rapidement
mariées :
- Anne Marie Martinozzi (1637-1672) devint Princesse de Conti
après son mariage fastueux avec le frère de Condé.
- Laure Martinozzi (1635 - 1687) épousa le Prince de
Modène et après sa mort gouverna pendant 12 ans
l’Etat de Modène.
- Laure Mancini (1636-1657) épousa le duc de Mercoeur
Vendôme (veuf, il fit construire à Aix le Pavillon
Vendôme pour la « Belle du Canet »). Mme
Venel était sa dame d’honneur lorsqu’elle mourut
à 21 ans.
La plus jeune, Marianne Mancini (1649-1714) fut élevée au
Louvre et au Palais Mazarin par Mme de Venel « Mme de Venel
et moi avons fait des chansons » écrivait-elle
à son oncle.
Epouse du Duc de Bouillon, elle fut la protectrice
de La Fontaine.
Au 17°
siècle la ville d’Aix s’embellit avec la
construction d’édifices religieux.
Le 1° mai 1647, le
Cardinal-Archevêque Michel de Mazarin, posait la première
pierre de la chapelle construite sur les plans de Pierre Pavillon. Sa
haute et étroite façade constitue un remarquable
échantillon du style baroque. Conçu pour donner aux
jeunes religieuses la vocation contemplative, le monastère se
consacra bientôt à l’éducation des jeunes
filles de 10 à 12 ans, il accueillit les deux petites filles de
Mme de Sévigné, Pauline et Marie-Blanche de Grignan qui y
sont ensevelies.Mme de Venel fut une bienfaitrice du couvent des
Visitandines.En
1652, Laure Martinozzi, duchesse de Modène, s’est
arrêtée à Aix chez son ancienne gouvernante, Mme de
Venel. Pour lui témoigner son amitié et en action de
grâce pour la naissance de son premier fils en 1653, elle
commanda un splendide retable de style italien « la
Visitation ».

Conformément à ses intentions, Mme
de Venel décédée à Versailles en
1687, dans les bras d’Hortense Mancini, duchesse de Mazarin, fut
inhumée dans la chapelle Ste Croix de l’église de
la Visitation.
Gaspard de Venel demanda à être
enterré dans le même tombeau en 1692.


Sources : Archives Départementales 13 -
Bibliothèque Méjanes - AD 78
- Wikipedia – Genealogie.com
Association Généalogique des Bouches du Rhône
(AG 13) Antenne d’Aix en Provence
Exposition de Juin
2008
Réalisation Marie-Thérèse
Dirand
Poster original de
l'exposition